Système de santé : l’AFIPA propose quatre pistes de réforme
Dans son dernier plaidoyer*, l’AFIPA tire les grands enseignements de la crise sanitaire et formule quatre propositions concrètes pour réformer durablement le système de santé. L’association française de l’industrie pharmaceutique pour une automédication responsable préconise notamment la mise en place d’un parcours de soins pour les pathologies bénignes, coordonné par le pharmacien d’officine.
L’idée ne date pas d’aujourd’hui, mais elle repose désormais sur des arguments tirés d’une situation extrême. A l’instar du paracétamol, les produits de santé de premier recours ont joué un rôle central pendant la crise sanitaire. « La mobilisation des industriels a été exemplaire. Aucune rupture d’approvisionnement n’a été déplorée, y compris sur les spécialités les plus dispensées », rappelle Christophe de la Fouchardière, président de l’AFIPA. Autre motif de satisfaction évoqué, la continuité des soins n’a jamais été menacée, malgré les difficultés rencontrées. « Les pharmaciens d’officine ont toujours répondu présents, en conservant très majoritairement leurs horaires d’ouverture. Dans un climat anxiogène, ils ont activement contribué à maintenir le lien social. Certains n’ont pas hésité à développer des services de proximité, comme la livraison de médicaments à domicile », explique-t-il.
Deux études circonstanciées
Accessibilité, responsabilité, confiance, sécurité : l’AFIPA s’emploie depuis plus de deux décennies à vanter les mérites d’une « automédication » mieux structurée. Le contexte épidémique a-t-il changé la donne ? A priori oui, selon ses responsables, qui brandissent deux enquêtes d’opinion circonstanciées en guise de preuve. Durant le confinement, à l’heure où la fréquentation des cabinets médicaux a considérablement chuté, la demande n’a visiblement pas faibli. Près de la moitié des pharmaciens** ont signalé une augmentation des conseils prodigués pour la prévention ou le traitement des problèmes de santé bénins (42 %). Même son de cloche ou presque, du côté des patients***. Pandémie oblige, les personnes interrogées disent avoir modifié leurs habitudes comportementales. Plus rapide et moins contraignant, le recours à la pharmacie a souvent été privilégié. Nombre d’entre eux ont volontairement contourné le médecin généraliste (27 %). Entre mars et août derniers, l’essentiel de la population française se sera rendu sans prescription dans une officine pour acheter des médicaments, des dispositifs médicaux ou des compléments alimentaires (79,8 %). En l’espace de quelques mois, le nombre total de visites enregistrées l’année précédente a déjà été atteint. A la croisée de ces deux études, l’élargissement de l’offre thérapeutique actuelle fait l’objet d’un relatif consensus. Sans surprise, les pharmaciens y sont quasiment tous favorables (98 %). Les patients aussi, mais dans une bien moindre mesure (39 %).
Des vertus sous-exploitées
Au-delà du constat, l’AFIPA formule quatre propositions concrètes pour réformer durablement le système de santé. Une nouvelle fois, elle préconise la mise en place d’un parcours de soins officinal pour la prise en charge des pathologies bénignes. « L’inscription des produits et des conseils délivrés dans le dossier pharmaceutique devra être systématique », précise Christophe de la Fouchardière. Les membres de l’association plaident également pour un renforcement des actions systémiques en faveur du bon usage, à commencer par le lancement d’une campagne de communication nationale, centrée sur les affections concernées et légitimée par des données scientifiques. L’AFIPA recommande par ailleurs l’intégration pleine et entière de la médication officinale dans les politiques publiques, non sans souligner ses vertus organisationnelles et médico-économiques. « Le délistage de quatre-vingt-dix molécules disponibles dans des pays limitrophes permettrait de désengorger les cabinets médicaux et les services d’urgence, sans risque majoré pour la santé. Nous avons identifié un potentiel d’économies d’un milliard et demi d’euros par an pour la Sécurité sociale, principalement grâce aux consultations médicales évitées », détaille Luc Besançon, son délégué général. Dernière suggestion et non des moindres, l’association réclame un assouplissement des contraintes réglementaires, administratives et fiscales qui pèsent sur les médicaments fabriqués en France et en Europe. « La valorisation et la promotion des filières de production sera un prérequis essentiel pour faciliter les relocalisations », insiste Christophe de la Fouchardière. Impassibles jusqu’alors, les autorités seront-elles sensibles à cette dialectique ?
Jonathan Icart
(*) « Faire des produits de santé et de prévention de premier recours un levier de résilience et d’accès aux soins de proximité en France », AFIPA (septembre 2020).
(**) « Etude d’opinion auprès des pharmaciens d’officine », Stethos/AFIPA (août 2020).
(***) « Impact du Covid-19 sur les comportements des Français », Harris Interactive/AFIPA (septembre 2020).