Frédéric Collet, président du LEEM « Un signal fort en faveur de nos entreprises »
Le président du LEEM accueille avec satisfaction la version initiale du PLFSS 2021, qui allège la facture traditionnellement imposée aux laboratoires pharmaceutiques. Mais l’organisation restera vigilante à l’occasion du débat parlementaire.
Le LEEM a exprimé, dans un communiqué publié le jour de la présentation du PLFSS 2021, sa satisfaction sur la teneur du projet de loi. En quoi est-il différent des exercices précédents ?
En effet. Pour une fois, ce projet de loi semble concrétiser des avancées réelles en matière de politique du médicament. Après plusieurs mois d’une intense concertation, nos arguments ont porté leurs fruits. Je noterai d’abord la cohérence de ce texte, qui traduit les engagements pris par le Président de la République, en août dernier à Villeneuve-la-Garenne. Ainsi, la diminution sensible de l’enveloppe des baisses de prix constitue un signal fort : l’exécutif reconnait les effets durables de ces coupes budgétaire sur la compétitivité du secteur, l’attractivité de notre territoire en termes d’investissement et la pérennité de nos sites industriels. Nous constatons également un effort de cohérence pour mieux concilier l’approche régalienne et la démarche conventionnelle. Le gouvernement a ainsi renoncé à faire voter le « taux A », un mécanisme d’encadrement budgétaire imposé aux dépenses de médicaments innovants en oncologie. Et il entend donc privilégier la voie conventionnelle avec les entreprises concernées. Nous prenons acte, par ailleurs, de la décision de fixer le taux M (l’objectif de dépenses de médicaments) en valeur et non plus en taux, ce qui va améliorer la lisibilité des mécanismes de régulation. Enfin, il faut se féliciter de la refonte totale des dispositifs d’accès précoce à l’innovation (ATU et RTU), avec l’ambition de les simplifier et de renforcer la prévisibilité de ces mécanismes pour les industriels. Nous serons toutefois très attentifs aux textes d’application.
Y a-t-il cependant des réserves ou des points de vigilance qui vous mobiliseront durant le débat parlementaire ?
Nous serons, bien entendu, particulièrement attentifs à la discussion du texte, alors que certains parlementaires ont déposé des amendements que nous jugeons contreproductifs, par exemple sur l’obligation de disponibilité des produits essentiels. Nous sommes également réservés sur la modification des mécanismes d’abattement conventionnel : la disposition est particulièrement complexe, peu lisible et se situe nettement en retrait des règles conventionnelles actuelles. Enfin, nous nous associons aux organisations professionnelles des pharmaciens d’officine et aux associations de patients pour demander la suppression de l’article 66 de la LFSS 2020.Malgre les amodiations du dispositif dont nous attendons toujours les textes d’application, cet article de loi contribue à fragiliser l’offre de médicaments sur le marché français, au moment même, ou les ruptures d’approvisionnements deviennent un sujet de plus en plus sensible.
Outre ce PLFSS, des échéances importantes se profilent dans les mois à venir pour la politique du médicament. Comment le LEEM compte-t-il se positionner ?
En effet, le PLFSS est une des briques – essentielle-, parmi d’autres, qui doivent permettre de rebâtir une politique du médicament ambitieuse et adaptée aux enjeux sanitaires du futur. La crise de la Covid-19 est un révélateur des faiblesses de notre système de santé, en termes de disponibilité des médicaments, d’autonomie stratégique sanitaire et d’accès à l’innovation. Le seul moyen de les combler, c’est d’assurer l’indispensable croissance de notre secteur. Le plan France Relance, qui place les industries de santé parmi les cinq secteurs stratégiques pour la compétitivité de notre économie à l’horizon 2030 devrait y contribuer puissamment. Dans les mois à venir, le LEEM va s’impliquer dans plusieurs dossiers décisifs. Nous entendons participer aux travaux du HCAAM sur la refonte de l’ONDAM, afin de défendre les idées que nous portons depuis longtemps : une plus grande transparence sur les méthodes de calcul, la pluriannualité des engagements financiers et le décloisonnement des enveloppes. Par ailleurs, les travaux sur le prochain accord-cadre avancent bien, grâce notamment à une réelle qualité d’écoute du nouveau président du CEPS, Philippe Bouyoux. Nous sommes optimistes sur notre capacité à aboutir à un accord avant la fin de l’année. Enfin, le LEEM sera mobilisé au prochain semestre, dans le cadre de la préparation Conseil stratégique des industries de santé, prévu en juillet prochain. Ce CSIS doit être l’occasion de relancer plusieurs chantiers importants, comme la réforme de l’évaluation, la relance de la politique industrielle ou la réduction massive des délais d’accès au marché.
Propos recueillis par Hervé Réquillart