Bayer décrypte la transformation de sa R&D
A l’occasion d’un évènement international organisé pour la presse le 13 janvier, les dirigeants de la division pharmaceutique de Bayer, mais aussi ceux de sociétés nouvellement acquises, ont mis en lumière quelques « pépites » du pipeline du groupe, illustrant sa nouvelle stratégie de R&D.
« L’heure est moins aux économies qu’à la transformation ». Ainsi Stefan Oelrich, membre du comité exécutif de Bayer et président de sa division pharmaceutique, résume-t-il la philosophie de la nouvelle stratégie de R&D du groupe allemand. L’élargissement du portefeuille par croissance externe se renforce depuis deux ans et l’industriel se félicite d’avoir réussi à « attirer les cerveaux les plus brillants ».
L’année 2020 a ainsi été marquée par la signature de 25 partenariats et quelques acquisitions, la plus emblématique étant celle d’Asklepios Biopharmaceuticals – AskBio – pour 4 Mds$. Suite à ce rachat bouclé au 1er décembre dernier, la société américaine, spécialisée dans les thérapies géniques s’appuyant sur les vecteurs AAV, poursuit son activité chez Bayer en tant que filiale autonome. Tout comme BlueRock Therapeutics, rachetée en 2019, que le groupe avait contribué à créer en 2016.
« Nous voulons disposer des meilleures plateformes de thérapies cellulaires et géniques. »
Stefan Oelrich, président de Bayer Pharmaceuticals
« Nous combinons le meilleur des deux mondes : ces entreprises peuvent désormais se consacrer à la science plutôt qu’à la recherche de financements, affirme Stefan Oelrich. Nous voulons disposer des meilleures plateformes de thérapies cellulaires et géniques ».
De larges marchés potentiels
Le pari était risqué pour Bayer, longtemps focalisé sur les molécules chimiques. Ces récentes opérations transforment les activités pharmaceutiques du groupe, et pourraient commencer à impacter significativement la croissance à compter de 2025.
Certaines des innovations développées s’adressent en effet à des marchés très larges, comme la maladie de Parkinson. Le traitement qui fait encore référence aujourd’hui, la levodopa, a été découvert il y a 65 ans ! Mais BlueRock a obtenu la semaine dernière le feu vert des autorités américaines pour démarrer les essais cliniques chez l’homme dans cette pathologie avec une approche inédite : l’implantation dans le cerveau de neurones dopaminergiques dérivés de cellules souches pluripotentes induites (iPS). Et la société ambitionne de déployer sa technologie dans d’autres aires thérapeutiques, notamment en cardiologie, l’une des trois grandes aires d’intérêt de Bayer (au côté de l’oncologie et de la santé des femmes).
De même AskBio compte-t-il exploiter ses vecteurs AAV au-delà des seules maladies rares monogéniques. « Nous voulons étendre notre plateforme scientifique le plus possible en l’ouvrant vers d’autres domaines, comme les maladies cardiovasculaires », indique Sheila Mikhail, CEO et co-fondatrice de la société.
Maladies impactant la qualité de vie
Même avec des médicaments plus traditionnels, Bayer mise sur des programmes capables de constituer des pipelines à eux seuls. La conférence a ainsi mis à l’honneur les antagonistes du P2X3, canal cationique majoritairement exprimé au niveau des fibres nerveuses sensorielles. Cette classe thérapeutique est depuis plusieurs années l’objet d’un partenariat avec la société allemande Evotec, avec notamment un programme en cours dans l’endométriose. C’est dans ce contexte qu’a été mis en évidence son potentiel dans d’autres pathologies liées à l’hypersensibilité nerveuses, aussi différentes que les quintes de toux chroniques compulsives ou l’hyperactivité vésicale. Celles-ci ont en commun un fort impact délétère sur la qualité de vie. Un antagoniste de P2X3 baptisé eliapixant est aujourd’hui développé en phase II par Bayer dans ces deux indications.
Julie Wierzbicki