Biologie médicale : une indispensable collaboration public/privé
Après plus d’un an de lutte contre le Covid-19, l’association pour le Progrès de la Biologie Médicale (APBM), qui fédère les grands réseaux de laboratoires français, tire les leçons de la pandémie pour construire un système à même de répondre aux prochaines crises, notamment en s’appuyant sur des collaborations entre public et privé.
« Malgré des signaux de la vulnérabilité de nos sociétés modernes face aux maladies infectieuses, nous n’avons pas su tirer les leçons des crises antérieures du SRAS, MERS ou H1N1 », déplore l’infectiologue Anne-Claude Crémieux, lors du point presse de l’APBM « Comment anticiper les prochaines pandémies et protéger les populations ? » le 6 juillet 2021. Des mesures visant à anticiper ces risques avaient été décidées dans de nombreux pays, dont la France, mais la survenue du nouveau coronavirus a balayé les moyens de défenses mis en place. « Avec le SARS-CoV-2, le séisme a été beaucoup plus fort à cause des formes invisibles qui ont empêché de limiter la diffusion virale et de casser les chaînes de transmission », complète l’infectiologue. Le retard pris entre l’identification de ce nouvel agent infectieux, dont le génome a été isolé et séquencé très rapidement début janvier 2020 à Shanghai, et les mesures d’isolement, explique l’extension rapide de ce virus à travers le Monde. Alain Le Meur, biologiste médical et président de l’APBM, retient toutefois trois grands enseignements de cette bataille que la biologie médicale mène depuis plus d’un an : « Une mobilisation sans égal ; une rapidité de la R&D pour mettre au point des tests efficaces et une agilité des activités réglementaires pour réaliser les actes ; ainsi qu’une coordination avec les ministères et entre le public/privé. »
Tester-Alerter-Protéger
Il est vite apparu qu’un moyen essentiel de lutte contre le SARS-CoV-2 était de pouvoir tester tous les cas suspects ou cas contacts, en premier lieu avec le test de référence, le test RT-PCR. Exclusivement réalisés par les hôpitaux au début de l’épidémie, ces examens biologiques ont ensuite été effectués par les laboratoires privés. Ils ont su très rapidement monter en capacité en achetant du matériel supplémentaire, en recrutant massivement du personnel, afin de répondre à l’objectif d’au moins 700 000 tests par semaine et jusqu’à atteindre 3 millions de tests/semaine. Une collaboration étroite s’est nouée entre les biologistes privés et publics, les ARS, et les responsables en charge du Covid-19 au ministère. Nadia Bouzigues, directrice de la Task Force Tests Covid-19 au ministère de la Santé, salue les innovations « pour la mise au point de nouveaux modes de prélèvement, notamment des tests salivaires, puis des tests de criblage à la recherche des variants, puis des activités de séquençage NGS afin d’identifier chaque variant ».
Vers un meilleur pilotage national et local
Pour Didier Jaffre, directeur de l’offre de soins à l’ARS d’Ile de France, il est important de tirer les conséquences de cette crise en maintenant « des échanges réguliers entre les différents acteurs pour que la biologie médicale puisse être prête à tout moment à faire face à de nouveaux risques infectieux ». Il se bat aujourd’hui pour conserver les moyens matériels et humains du secteur mobilisés à l’occasion de l’épidémie de Covid-19, « faute de quoi il faudrait reconstruire de nouveau un système qui a fait ses preuves ». Il est désormais nécessaire de prendre en compte l’importance des tests innovants en biologie, et la maîtrise locale de leur chaîne de production.
Juliette Badina