Médecine de l’obésité : quelles avancées ?
Nouveaux traitements, nouvelles recommandations, expérimentations de parcours pluriprofessionnels : la prise en charge de l’obésité entre dans une nouvelle ère. Une reconnaissance de la maladie qui redonne de l’espoir aux patients.
« C’est une reconnaissance de l’obésité comme maladie chronique » : le Dr Lysiane Jubin, nutritionniste et directrice médicale obésité de Novo Nordisk France, a salué la publication en juin dernier par la HAS de recommandations de bonne pratique dans la prise en charge de l’obésité chez l’adulte. « Ces recommandations permettent de clarifier les trois niveaux de recours : c’est très important pour les patients de savoir où ils en sont », assure la journaliste santé Hélia Hakimi-Prévot, autrice de « La vérité sur l’obésité, comprendre et soigner cette nouvelle épidémie ».
Ces bonnes pratiques intègrent notamment la possibilité de recourir à des thérapies médicamenteuses, en cas d’échec d’une prise en charge nutritionnelle. Par le passé, « on a vu se succéder toute une série de médicaments, qui ont conduit à des échecs », rappelle Hélia Hakimi-Prévot. Selon elle, la mise à disposition récente dans cette pathologie d’une classe de médicaments, les analogues de GLP-1, déjà utilisée dans le diabète de type II « et sur laquelle on a un vrai recul », constitue une avancée cruciale. « L’accès précoce accordé à notre médicament Wegovy® est aussi une façon de reconnaître l’obésité comme une maladie où il y a de l’innovation, se réjouit le Dr Lysiane Jubin. Il n’y a pas « une » obésité, chaque patient est différent. Plus l’arsenal thérapeutique sera large, mieux on pourra proposer une prise en charge adaptée à chacun. »
Globaliser les parcours
Malgré ces avancées indéniables, beaucoup reste à faire car comme le souligne le Dr Vincent Frering, président de la Société française et francophone de chirurgie de l’obésité et des maladies métaboliques, « quelle que soit la stratégie de traitement, c’est une maladie dont on ne guérit pas : il y a des récidives. L’obésité est une école de l’humilité. Personne ne détient la vérité pour soigner cette maladie complexe. Toutes les initiatives sont les bienvenues ! On peut réellement soulager la souffrance des malades. » Le praticien regrette cependant que le tout récent rapport d’évaluation de la HAS sur la « chirurgie métabolique » (dont l’objectif principal est la régulation du métabolisme glucidique plutôt que la perte de poids) chez les patients atteints de diabète de type 2 et souffrant d’obésité réserve cette option en dernier recours. « Pourquoi attendre d’en être aux dernières extrémités pour opérer ? La chirurgie est un outil puissant : sachons l’intégrer plus tôt dans le parcours. » Approche nutritionnelle, activité physique, médicament mais aussi chirurgie : toutes ces options ont leur place dans la prise en charge qui doit désormais être pensée de façon globale et dans la durée.
Une prise en charge ancrée sur le territoire
Le Dr Jocelyne Raison, médecin nutritionniste et présidente du réseau de santé régional obésité adultes en Ile-de-France (ROMDES), veut porter « une vision d’avenir et beaucoup plus positive » à travers l’expérimentation de type article 51, baptisée GPS-Obésité. Déployée sur trois régions (Centre-Val de Loire, Hauts-de-France et Ile-de-France), elle propose une prise en charge de premier recours fondée sur une équipe pluriprofessionnelle, en partenariat avec les services hospitaliers et les spécialistes de ville. « Nous avons réussi à travailler en co-construction et à embarquer tous les acteurs du territoire sur cet itinéraire », se félicite la nutritionniste. Celle-ci insiste sur l’accompagnement et la formation des médecins généralistes (qui n’ont que 4h de cours sur l’obésité en formation initiale) pour améliorer la prise en charge de proximité, ainsi que l’accompagnement éducatif du patient. « L’objectif final est de rendre le patient plus autonome pour prendre part à la décision thérapeutique, et d’améliorer sa qualité de vie. S’il se sent bien, il sera plus en mesure de perdre du poids. »
Julie Wierzbicki