Radiothérapie flash : un «saut quantique» en cancérologie
Après des résultats pré-cliniques et cliniques majeurs, un partenariat public-privé se met en place dans l’objectif de rendre accessible la technologie de radiothérapie flash à un plus grand nombre de patients atteints de cancer.
Le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) de Lausanne (Suisse), le Laboratoire européen pour la physique des particules (CERN) et la société THERYQ (groupe ALCEN) ont signé un accord portant sur le développement et la construction du premier appareil au monde de radiothérapie flash de pointe. « En tant qu’hôpital universitaire, le CHUV s’est associé à un centre de recherche d’envergure mondiale et à un partenaire industriel à la pointe du progrès pour résoudre une problématique médicale, physique et technique et trouver des solutions novatrices de lutte contre le cancer, s’est réjoui en conférence de presse de lancement, ce vendredi 25 novembre, le professeur Philippe Eckert, directeur général du CHUV. C’est un saut quantique dans le domaine de la cancérologie », assure-t-il. Cet appareil, fondé sur la technologie du CERN, utilisera des radiations à électrons à très haute énergie (Very High Energy Electrons – VHEE) pour traiter tous types de cancers résistants aux traitements conventionnels. Il sera installé au CHUV et devrait être opérationnel d’ici deux ans pour des premiers essais cliniques à l’horizon 2025/2026. « Cela représente un espoir très important d’augmenter l’efficacité de la radiothérapie conventionnelle, se félicite le professeur Jean Bourhis, chef du Service de radio-oncologie du CHUV. En réduisant l’irradiation à quelques millisecondes, la radiothérapie flash diminue considérablement les effets secondaires sur les tissus sains tout en augmentant l’efficacité sur les tumeurs. »
Une prouesse technologique
Ce développement est l’aboutissement des premières études en 2013 sur l’effet flash, du traitement avec succès d’un premier patient atteint d’un cancer de la peau en 2019 et d’un programme innovant de transfert clinique de la radiothérapie flash initié en 2020 entre le CERN et le CHUV. Celui-ci a vu l’installation d’un premier prototype baptisé FLASHKNiFE, fabriqué par la société de technologie médicale THERYQ, pour traiter en flash des tumeurs superficielles ou peu profondes (jusqu’à 3 cm). Une nouvelle révolution s’annonce aujourd’hui. « En intégrant la technologie novatrice d’accélérateur linéaire compact développée par le CERN, notre outil FLASHDEEP utilise des faisceaux d’électrons de très haute énergie de 100 à 200 MeV, détaille Ludovic Le Meunier, directeur général de THERYQ. 10 à 20 fois plus puissants que ceux du FLASHKNiFE, ces rayons permettront de traiter en moins de 100 millisecondes tous types de cancers jusqu’à une profondeur de 20 cm, augmentant considérablement le nombre de patients traités. » L’accélérateur, fondé sur la technologie CLIC (Compact Linear Collider) du CERN, aura un volume compatible avec son intégration dans un campus hospitalier. « Les appareils de radiothérapie fondés sur notre technologie des accélérateurs d’électrons sont également nettement plus compacts et moins coûteux que les installations actuelles de thérapie à base de protons », indique Mike Lamont, directeur du CERN pour les accélérateurs et la technologie.
Un projet multidisciplinaire
« Ce projet réunissant en étroite collaboration des biologistes, des physiciens et des médecins s’inscrit parfaitement dans les objectifs de soutien à la recherche en oncologie translationnelle de la Fondation ISREC, qui a rendu possible ce développement », ajoute le professeur Pierre-Marie Glauser, président de la Fondation. Celle-ci contribue en effet au développement de la technologie flash depuis 2016 déjà et a apporté un financement, en partenariat avec la Fondation Biltema, de 25,8 millions CHF.
Juliette Badina