Sciences

Alzheimer : miser sur la prévention

« Prévenir la maladie d’Alzheimer », tel est le thème central mis en avant par la Fondation Vaincre Alzheimer dans son Rapport annuel de la recherche médicale. Alors que la connaissance sur les facteurs de risque s’affine, de larges études sont mises en place en France et à l’international pour démontrer qu’agir sur ces causes peut enrayer le déclin cognitif.

1,4 million de personnes en France sont touchées par la maladie d’Alzheimer ou une autre maladie dégénérative neuro-cognitive. Et alors que les tout premiers traitements autorisés (1) montrent une efficacité réelle mais limitée, au prix d’effets secondaires potentiellement délétères, la Fondation Vaincre Alzheimer a choisi de mettre l’accent sur la prévention comme potentielle « solution pour demain ». La présentation à la presse de son Rapport annuel de la recherche médicale, le 11 septembre dernier, en amont de la Journée Mondiale Alzheimer (21 septembre), a été l’occasion de mettre en avant les études conduites en France et dans le monde pour tenter de valider scientifiquement des facteurs de risque et démontrer l’impact de leur réduction sur les performances cognitives et l’apparition de la maladie.

Des facteurs de risque identifiés et validés

Le rapport de consensus de la commission sur les démences de la revue The Lancet, paru en août 2024, établissait 14 facteurs de risque modifiables (2). Le Dr Cécilia Samieri, directrice de recherche Inserm au Centre de recherche sur la santé des populations de Bordeaux, distingue les facteurs psycho-sociaux (comme le niveau d’éducation ou les interactions sociales), qui impactent la « réserve cognitive », et ceux liés au mode de vie (cardiométabolisme, activité physique…). Parmi les causes environnementales, seule la pollution de l’air est pour l’instant validée. « Il existe d’autres facteurs supposés, comme le sommeil ou le microbiote, pour lesquels le niveau de preuves est encore insuffisant, mais des études sont en cours », note Marion Levy, responsable études et recherche de la Fondation Vaincre Alzheimer. « Ces 14 facteurs sont la partie émergée de l’iceberg ! affirme Cécilia Samieri. Mais il est très difficile d’un point de vue statistique de déterminer l’impact d’un facteur par rapport à un autre, car beaucoup sont liés. » « Le niveau de risques auxquels on est exposé change tout au long de la vie. C’est extrêmement complexe à gérer pour épidémiologiste ! », renchérit le Pr Sandrine Andrieu, PU-PH à l’Université et au CHU de Toulouse et membre du comité exécutif de l’IHU HealthAge.

Démontrer l’impact d’une intervention multimodale

Selon la commission de The Lancet, agir sur ces facteurs permettrait de réduire de 45 % le nombre de personnes touchées par ces maladies. Mais il est tout aussi complexe d’évaluer précisément le bénéfice d’une action sur un ou plusieurs de ces déterminants dans des études interventionnelles. Une précédente étude multicentrique française, MAPT (Multidomain Alzheimer Preventive Trial), initiée en 2008, agissant sur trois facteurs clés (la stimulation cognitive, l’activité physique et la nutrition), n’avait pas permis de démontrer l’effet d’une intervention multimodale, « notamment du fait d’un très faible taux d’adhésion au programme au bout des trois ans de suivi » rapporte le Pr Andrieu qui en était l’une des investigatrices. En revanche, l’étude finlandaise FINGER lancée en 2009 et conduite sur des sujets plus à risque, fut la première à apporter la preuve de l’intérêt d’un programme combinant plusieurs interventions non médicamenteuses sur le maintien des fonctions cognitives.
Enfin, une étude américaine, POINTER, a été initiée en 2019, impliquant plus de 2 100 sujets de 60 à 79 ans présentant un risque augmenté de déclin cognitif et reflétant la diversité ethnique et socio-professionnelle de la population. Celle-ci vise à comparer l’impact de deux actions multimodales sur deux ans portant à la fois sur l’activité physique et cognitive et la nutrition ; le premier groupe suivant un programme d’interventions très dense et encadré avec un suivi régulier, le deuxième appliquant un programme « autogéré » avec une surveillance plus espacée. Les premiers résultats ont été présentés en juillet, montrant une très bonne adhésion (plus de 90 %) et une amélioration cognitive après deux ans dans les deux groupes, avec de meilleurs résultats pour le groupe « encadré ». Un suivi à quatre ans sans intervention spécifique est prévu pour vérifier si ces « bonnes habitudes de vie » et l’impact cognitif sont maintenues dans le temps.

Détecter au plus tôt les premiers signes de fragilité

Pour le Dr Cécilia Samieri, « on ne pourra pas avancer sans une approche plus systémique de la prévention : il faut pousser les grands programmes de santé publique à aller dans ce sens ».
Un message semble-t-il entendu par les pouvoirs publics : la prévention fait partie des six axes de la Stratégie nationale maladies neurodégénératives 2025-2030 lancée le 4 septembre dernier par le ministère de la Santé, avec un accent particulier mis sur le programme ICOPE (Integrated Care for Older PEople). L’initiative a été lancée en 2017 par l’OMS pour favoriser un continuum de soins intégrés centrés sur la personne âgée. En France, le Gérontopôle du CHU de Toulouse a été pionnier dans son déploiement dès 2019, avec l’objectif de repérer le plus tôt possible les premiers signes de fragilité, grâce à un questionnaire proposé sur une application mobile (ICOPE Monitor), sur une base volontaire en population générale. Réalisé tous les six mois, celui-ci porte sur six fonctions essentielles au maintien de l’autonomie (mémoire, nutrition, vision, audition, psychologie, mobilité). Le repérage précoce de signaux faibles permet d’intégrer rapidement les sujets concernés dans un parcours de soins adapté. « Plus de 90 000 personnes sont déjà suivies en Occitanie ! », se réjouit le Pr Andrieu. Généralisé par la loi « Bien vieillir » d’avril 2024, ICOPE se déploie désormais progressivement sur l’ensemble du territoire. En parallèle, un essai multicentrique clinique promu par le CHU de Toulouse a été initié en octobre 2024 pour évaluer le coût-bénéfice du programme chez un millier de volontaires de 65 ans et plus (dont 400 déjà randomisés), présentant au moins deux troubles cognitifs fonctionnels.

Julie Wierzbicki

(1) Après un refus initial pour les deux produits, Leqembi® (lécanémab, Eisai et Biogen) a obtenu une AMM européenne en avril 2025 et Kisunla™ (donanémab, Lilly) un avis favorable du comité des médicaments à usage humain de l’EMA fin juillet. La HAS a publié le 9 septembre un refus d’accès précoce à Leqembi®.

(2) Aux 12 facteurs de risque modifiables précédemment identifiés (hypertension artérielle, diabète, obésité, tabagisme, consommation d’alcool excessive, dépression, déficit auditif, inactivité physique, isolement social, faible niveau d’éducation, traumatismes crâniens, pollution atmosphérique), la commission de The Lancet sur les démences a ajouté en 2024 deux nouveaux facteurs pour lesquels les preuves sont jugées suffisamment convaincantes : la perte de vision non traitée et un taux élevé de cholestérol LDL.


tags

Partage

Sur le même thème :

close

Contact Abonnements

Pour les abonnements de GROUPE ou individuel JOURNALISTE/ÉDITEUR/ÉTUDIANT/DEMANDEUR D'EMPLOI/RETRAITÉ, veuillez nous consulter afin d’avoir un devis personnalisé.

Par téléphone au 01 40 92 70 58

pharmaceutiques_illustrations_telephone

Du lundi au vendredi de 9h30 à 13h00
et de 14h00 à 17h00

Par mail

pharmaceutiques_illustrations_email
close

Contact Abonnements

Pour les abonnements de GROUPE, veuillez nous consulter afin d’avoir un devis personnalisé.

Par téléphone au 01 40 92 70 58

pharmaceutiques_illustrations_telephone

Du lundi au vendredi de 9h30 à 13h00
et de 14h00 à 17h00

Par mail

pharmaceutiques_illustrations_email
close

Contact Abonnements

Pour les abonnements de GROUPE, veuillez nous consulter afin d’avoir un devis personnalisé.

Par téléphone au 01 40 92 70 58

pharmaceutiques_illustrations_telephone

Du lundi au vendredi de 9h30 à 13h00
et de 14h00 à 17h00

Par mail

pharmaceutiques_illustrations_email
close

Contact Abonnements

Pour les abonnements de GROUPE ou individuel JOURNALISTE/ÉDITEUR/ÉTUDIANT/DEMANDEUR D'EMPLOI/RETRAITÉ, veuillez nous consulter afin d’avoir un devis personnalisé.

Par mail

pharmaceutiques_illustrations_email
close

Formulaire incomplet :

Revenir sur le formulaire

Votre demande à bien été envoyée

L'équipe Pharmaceutiques s'engage à revenir vers vous dans un délai de 24h.

Retourner sur le site

Merci de l'intérêt que vous portez à Pharmaceutiques.

Votre demande à bien été transmise à l’équipe Pharmaceutiques.

Après acceptation de votre demande d’inscription, vous recevrez un mail de confirmation dans un délai de 24h.

Retourner sur le site

Votre demande d'essai pour une période de 7 jours a bien été prise en compte !

Rendez-vous le matin à 8h30 dans votre boîte mail.

Retourner sur le site

Votre demande d'information partenariat à bien été transmise.

L'équipe Pharmaceutiques s'engage à revenir vers vous dans un délai de 24h.

Retourner sur le site
close

Identification

Inscription   1/5

Pour créer votre compte Pharmaceutiques, merci de suivre les instructions suivantes :


Par mesure de sécurité, pour poursuivre votre inscription, merci de saisir le code de dévérouillage envoyé à votre boite mail.


Merci de compléter les informations suivantes :

Merci de compléter les informations suivantes :

Merci de saisir un mot de passe robuste :

  • 8 caractères
  • 1 Majuscule
  • 1 Minuscule
  • 1 chiffre
  • 1 Caractère spécial
J'ai lu et j'accepte les conditions générales d'utilisation

Nous sommes heureux de vous compter parmis nos membres.

Vous pouvez maintenant profiter de nos offres et services avec votre compte pharmaceutiques.

 
close

Notification