Pénuries : l’ordonnance Macron
Le Président de la République a présenté, en Ardèche le 13 juin, les premiers axes de son plan contre les ruptures, en annonçant notamment la diffusion de la liste des 450 médicaments considérés comme essentiels… et donc sous surveillance.
En tournée de reconquête auprès de l’opinion publique, Emmanuel Macron aura multiplié les déplacements en région sur le thème de la réindustrialisation cette semaine. Pénurie oblige, le sujet des médicaments essentiels a inauguré la séquence le 13 juin, avec un déplacement sur un site industriel du groupe Aguettant en Ardèche, avant la visite d’une usine de baskets le même jour, puis du salon Vivatech le lendemain, et pour finir, en fin de semaine, un discours sur la décarbonation de l’aviation. Le 13 juin, il s‘était rendu chez le façonnier pour mettre en valeur un investissement de 45 millions, destinée à créer deux nouvelles lignes de production d’anesthésiants, sur ses sites de Champagne (Ardèche) et Gerland (Lyon). L’entreprise, repreneuse avec Delpharm de la société Carlide dans le Nord (fabricant de poches pour solutions injectables), fait partie des bénéficiaires d’aides publiques dans le cadre de France 2030, aux côtés d’autres entreprises comme Seqens, EuroAPI , Ethypharm ou GSK France.
25 relocalisations sur les rails
Le président de la République a profité de l’événement pour formuler plusieurs annonces destinées à renforcer la souveraineté sanitaire du pays. En premier lieu, la fameuse liste des médicaments essentiels, attendue depuis la mi-mai, comprend 450 spécialités. Ils feront l’objet de mesures règlementaires destinées à sécuriser les chaînes d’approvisionnement de ces molécules. Parmi ces produits, 50 vont faire l’objet d’actions de relocalisation, dont 25 dès les prochaines semaines, grâce au soutien apporté à huit nouveaux sites dédiés et bénéficiant de 160 millions d’euros de subvention : GSK France (amoxicilline), Interor (anesthésiants, cardiologie, oncologie), Seqens (anesthésiants), EuroAPI (antidouleurs morphiniques), Aguettant (urgence et réanimation), Skyepharma (anticancéreux), Ethypharm (produits morphiniques), Benta Lyon (génériques).
La feuille de route Ruptures en fin de mois
Outre ces décisions, le chef de l’Etat a également annoncé la création d’un guichet unique, doté de 50 millions d’euros, dont l’objectif sera de soutenir les nouveaux projets de relocalisation. La feuille de route de la lutte contre les pénuries sera publiée fin juin, tandis qu’un « plan blanc médicament » est en préparation pour préparer la prochaine crise hivernale. Des actions de renforcement de la transparence seront mises en œuvre dans le cadre de ces travaux (médecins informés par leurs logiciels, anticipation des tensions pour les pharmaciens, partage de données sur le circuit de distribution). « Nous sommes dans un monde qui change, nous devons revoir notre gestion du risque et je veux prévoir les situations les plus critiques en cas d’aggravation potentiellement rapide de la situation sur un produit essentiel ou stratégique », a expliqué Emmanuel Macron. Enfin, la mobilisation à l’échelle de l’Europe sera au menu de prochains débats au sein de l’Union, dans le cadre du Critical Medicines Act et du PIIEC Santé.
Au moins un médicament par pathologie
La liste des 450 médicaments essentiels a été rendue publique le 13 juin sur le site du ministère de la santé. « La constitution de cette liste s’est fondée sur l’expérience de la Société Française d’Anesthésie Réanimation, peut-on lire pour expliquer la méthode de sélection. Elle a démarré par une approche associée aux grands organes (cœur, rein, cerveau) et a tenu compte de la criticité ou l’urgence médicale (ex. : infectiologie, endocrinologie, anesthésieréanimation). Les médicaments essentiels sont identifiés dans la logique d’une offre de soin de haute qualité. » Elle comprend plus de 40% des spécialités qui ont connu des situations de rupture ces dernières années. En plus des médicaments associés aux plans de santé publique (lutte contre les addictions, santé sexuelle, vaccins), plus de 110 classes de médicaments sont répertoriés, couvrant un large champ de prise en charge des pathologies chroniques. « L’objectif du gouvernement sera d’assurer la disponibilité d’au moins un médicament essentiel pour une classe donnée de médicaments et pour une pathologie donnée afin de garantir un soin de qualité, précise le ministère de la Santé. Le travail se poursuit pour intégrer les travaux des sociétés savantes qui aboutiront dans les prochaines semaines. La liste est évolutive et une méthodologie et comitologie sont mises en œuvre pour l’enrichir et l’actualiser, ainsi qu’examiner et déployer les mesures associées »