Un vent de liberté…
… soufflait sur le Jardin des Tuileries et au musée du Jeu de paume qui accueillait le 26 juin, la remise du 13e prix littéraire Paroles de Patients et du 7e prix Talents de Patients, deux créations du Leem (Les Entreprises du médicaments).
« Le choix d’un lieu d’art pour la remise de ce prix n’est pas une coïncidence, pour Thierry Hulot. Ces deux distinctions renvoient à une partie inexplorée de nos personnalités. » Il s’est aussi félicité d’être en ce musée qui, grâce à un partenariat avec France Alzheimer, a créé un parcours pour les patients atteints de cette maladie. Le président du Leem a tenu à rappeler que lors de la création du prix littéraire « Paroles de Patients » en 2008, celles-ci étaient peu audibles et rarement écoutées. Et cette récompense a, estime-t-il, contribué à faire bouger les lignes.
Il a été touché par les cinq ouvrages présélectionnés cette année, notamment par le rôle des aidants, appelant à se mobiliser pour que celui-ci soit reconnu. Il a également noté combien il était difficile de concilier pathologie chronique et travail. En saluant l’investissement de l’Inca sur la charte « Cancer et emploi », il propose la création d’une seconde approche « Maladie chronique et travail », sujets sur lesquels les laboratoires pharmaceutiques doivent être exemplaires.
Briser les chaînes de l’ADN
Enfin, Thierry Hulot a remercié les auteurs pour leurs témoignages à la fois courageux et importants avant de céder le micro à Gérald Kierzek – médecin et directeur médical chez Doctissimo – pour la remise des prix. Celui-ci est revenu sur le thème de cette année, la liberté. Celle de choisir ses soignants, d’accéder aux soins et aux traitements, mais aussi celle entravée par la maladie. Les patients peuvent s’évader à travers la lecture, l’écriture ou d’autres formes d’art. « La création artistique au sens large leur permet de ne pas se laisser enfermer », conclut-il. Alain Livartowski, président du jury, explique que le lauréat a fait l’unanimité. Julien Secheyron est récompensé pour son livre « Vous ne verrez plus ». « C’est l’histoire d’un homme racontée avec des mots justes, sincères et drôles. Ce n’est pas un livre triste, mais un ouvrage qui fait du bien, c’est pour cela que vous avez gagné, commente l’oncologue de l’Institut Curie. Vous nous faites entrer dans votre intimité, comme si nous en faisions partie, comme si nous étions amis. »
Il y a huit ans, l’auteur se voit diagnostiquer une neuropathie optique de Leber. Son ophtalmologue lui explique qu’il perdra la vue dans les trois prochains mois et qu’il n’existe pas de traitement pour cette pathologie orpheline. Si son livre est sous-titré « Devenir malvoyant à 30 ans, et guérir », c’est qu’il a pu être le quinzième patient de l’essai clinique d’une thérapie génique développée par GenSight Biologics. Après une seule injection, il a, petit à petit, recouvré partiellement la vue et une certaine perception des couleurs en 18 mois. Ce n’est pas un hasard si Thierry Hulot, en introduction, avait insisté sur l’urgence à agir pour les industriels de la santé, à ne pas perdre une minute et à accélérer pour rendre disponibles les traitements pour les patients. Julien Secheyron a retrouvé autonomie et liberté, mais il souffre toujours d’un handicap invisible et de difficultés à se réinsérer professionnellement. Il peut toutefois compter sur le soutien de ses proches et de ses collaborateurs. Il a aussi remercié Sophie Garcin, sa plume.
Le traitement comme clef des champs
Le prix Talents de Patients a ensuite été remis par Marta Kuznicki, directrice de la communication digitale et institutionnelle du Leem au sein de la Direction de la Communication. « Le compte Instagram @quoide9leo a relayé au total plus de 350 œuvres postées par des patients : une quarantaine ont été sélectionnées et soumise un première fois aux votes des internautes, de même que les six finalistes pour le vote final. » Ce prix du public a couronné Christelle Hameurt qui partage sur son compte Instagram – @materrehappy – ses dessins, photos… Pour elle, qui souffre d’un cancer du rein métastatique depuis 2008, cette art thérapie est comme un refuge. C’est aussi son moyen d’expression pour faire connaître le handicap invisible et porter un message d’espoir et de résilience. « L’enveloppe remise avec ce prix va me permettre de concrétiser le voyage de mes rêves en 2024, de sortir d’Europe et de ma zone de confort en me rendant au Népal », a-t-elle expliqué.
Une liberté qu’elle retrouve, comme Julien Secheyron, grâce à la prise en charge de sa pathologie. C’est pourquoi Philippe Lamoureux – directeur général du Leem – après avoir félicité les sélectionnés, les lauréats, mais aussi le jury, a souligné que les deux œuvres témoignent des progrès scientifiques auxquels nous assistons, qu’il s’agisse de cancer ou de thérapie génique. Le livre primé montre aussi combien les essais cliniques sont une aventure collective qui réunit patients, professionnels de santé et industriel. « Avant l’accès précoce ou l’accès direct, les essais cliniques constituent la première manière d’accéder aux innovations thérapeutiques. Il faut donc tout faire pour en attirer autant que possible sur le sol français », a-t-il affirmé.
Une brise nostalgique s’est fait sentir lorsqu’il a affirmé que c’était sûrement sa dernière édition de Paroles de Patients puisqu’il prendra sa retraite avant la prochaine. Mais aussi lorsque Dominique Noël – présidente du Festival de la Communication Santé et membre du jury – est venue évoquer Philippe Pozo di Borgo récemment disparu. Celui qui avait inspiré le film « Intouchables » faisait partie des sélectionnés pour son livre « Le Promeneur immobile » dénonçant la tyrannie de la performance. Le jury, avant même son décès, l’avait perçu comme son testament.
Aude Desombre
Retrouvez une présentation de l’ouvrage de Julien Secheyron « Vous ne verrez plus » dans un prochain numéro du magazine Pharmaceutiques.