PLFSS 2024 : le gouvernement affiche ses ambitions
Placé sous le signe de la maîtrise des dépenses, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale prévoit quelques investissements nouveaux, mais pas de reste à charge supplémentaire pour les assurés sociaux.
Pas de surprise… ou presque. Le nouveau projet de loi de financement de la Sécurité sociale a été officiellement présenté mercredi dernier par les représentants des ministres de l’Autonomie, de l’Economie et de la Santé. Réduction du déficit oblige, le gouvernement mise sur la responsabilisation des industriels, des prescripteurs et des assurés pour concrétiser ses ambitions : maîtriser les coûts de santé sans pénaliser l’accès aux soins des Français. Médicaments et dispositifs médicaux, actes et prescriptions, arrêts de travail, transports sanitaires, fraudes sociales… Le PLFSS prévoit un plan d’économies de 3,5 milliards d’euros. Il consent également des investissements choisis pour prévenir certaines maladies et amoindrir les pénuries. Hors dépenses en lien avec la crise sanitaire, l’Ondam progressera de 3,2 % pour atteindre 254,9 milliards d’euros en 2024. Dans une conjoncture dégradée, marquée par une inflation chronique, la puissance publique compte notamment sur le retour au « plein emploi » pour tenir un objectif optimiste, sinon irréaliste, au regard des dernières prévisions budgétaires.
Le virage de la prévention
La plupart des mesures ne sont pas nouvelles, mais elles occupent une place centrale dans un texte de loi, peut-être même pour la première fois. A des degrés divers, plusieurs dispositions emblématiques doivent accentuer le virage de la prévention : la mise en œuvre de la campagne de vaccination contre le papillomavirus dans les collèges et la suppression du ticket modérateur de certains vaccins, la gratuité des préservatifs dans les officines et le remboursement des protections périodiques réutilisables pour les moins de vingt-six ans* ou encore le déploiement des bilans de prévention créés par la LFSS 2023. Autre axe stratégique majeur : le gouvernement fournit trois solutions palliatives pour atténuer les effets des pénuries médicamenteuses**. En cas de tension constatée sur un produit, le ministre chargé de la Santé pourra prendre un arrêté pour rendre temporairement obligatoire les ordonnances dites de dispensation conditionnelle et la délivrance de médicaments à l’unité, mais aussi interdire ou limiter la téléprescription. Entre accès aux soins et bon usage, les pharmaciens d’officine pourront par ailleurs prescrire des antibiotiques contre l’angine et la cystite simple après la réalisation d’un test rapide d’orientation diagnostique.
Le grand absent
Le gouvernement envisageait sérieusement de doubler le montant des franchises médicales et des participations forfaitaires des assurés sociaux pour « responsabiliser les patients et réduire la surconsommation de médicaments ». Il n’en sera rien… pour le moment. Porté par Bruno Lemaire, Thomas Cazenave et Aurélien Rousseau depuis plusieurs semaines, le sujet ne fait pas l’unanimité au sein de la majorité. Le message est clair : la mesure est en cours de discussion et sa mise en œuvre se fera par voie règlementaire. Les incidences économiques et sanitaires de cette réforme controversée ne sont pas neutres. D’après les calculs de Bercy, elle pourrait rapporter entre 700 et 900 millions d’euros par an. Selon ses détracteurs, elle pourrait aggraver le renoncement aux soins pour ceux qui en ont le plus besoin, soit les plus fragiles et les plus malades. Dans un contexte inflationniste, la moindre hausse du reste à charge des ménages ne manquerait pas de susciter des débats animés sur les bancs de l’Assemblée. Un amendement de dernière minute n’est toutefois pas exclu au cours de la navette parlementaire. Prélèvement obligatoire ou non, le projet gouvernemental pourrait être une nouvelle fois frappé du sceau du 49.3. Cette arme constitutionnelle avait été dégainée cinq fois durant l’examen de la LFSS 2023.
Jonathan Icart
(*) Les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire pourront également prétendre au remboursement des culottes et des coupes menstruelles sans limite d’âge.
(**) Le gouvernement prévoit aussi d’autoriser et d’utiliser des « préparations officinales spéciales » dans le cadre du « plan blanc médicaments ».