Tulipe : la face cachée de l’industrie pharmaceutique
Chaque année, Tulipe fournit plusieurs dizaines de tonnes de produits médicaux à des organisations humanitaires. Financée et alimentée par l’industrie pharmaceutique, cette association intervient dans les situations d’urgence sanitaire, climatique ou militaire. Bilan et perspectives.
Trait d’union entre l’industrie pharmaceutique et les organisations humanitaires, Tulipe aura délivré 35 tonnes de produits médicaux en 2020. « La contribution de nos membres a augmenté de 15 % », se félicite Patrice Carayon, son président1. Une progression essentiellement liée à deux événements majeurs : l’explosion chimique au port de Beyrouth2 et la guerre civile en Arménie. « Ces deux situations critiques ont concentré près du tiers de nos dons », souligne-t-il. Fondée il y a trente-neuf ans, cette association loi 1901 est reconnue d’utilité publique. Elle est financée par ses cinquante adhérents via une « cotisation raisonnable », proportionnelle au chiffre d’affaires. Spécialisée dans l’aide d’urgence, elle centralise les médicaments, les dispositifs médicaux et les compléments alimentaires, gratuitement fournis par les entreprises de santé. « Ce matériel de première nécessité s’adresse à des populations fragilisées par des crises sanitaires aiguës, des catastrophes naturelles ou des conflits militaires », précise Patrice Carayon.
Une année productive
Pour faciliter le stockage et l’expédition des spécialités collectées, Tulipe a emménagé dans un nouvel entrepôt de 1 500 m3, implanté dans la commune du Thillay. « Il a été entièrement rénové pour répondre aux exigences de qualité pharmaceutique », signale Patrice Carayon. Situé à proximité de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, ce bâtiment est opérationnel depuis le mois de juillet. Autorisé par l’ANSM, il bénéficie du statut d’établissement pharmaceutique distributeur. « La préparation et le contrôle des kits sont validés par un pharmacien responsable », rappelle-t-il. Malgré la pandémie, les opérations courantes n’ont jamais cessé, y compris pendant le premier confinement : « Nous avons obtenu une dérogation exceptionnelle, justifiée par le caractère solidaire de nos activités. » Dans le cadre de ses prérogatives, Tulipe aura alimenté vingt organisations non gouvernementales, chargées de récupérer et/ou d’acheminer les palettes confectionnées. Plus de 400 000 patients issus de quinze pays en auront profité l’an dernier.
Des projets ambitieux
Plutôt valorisant, ce bilan ne satisfait pas pour autant les responsables de l’association, qui se sont lancés un nouveau défi. Outre la mise à disposition des produits, ils souhaitent promouvoir un mécénat de compétences. « Nous sommes au stade des déclarations d’intention et des premières expérimentations », nuance Patrice Carayon. Dans les faits, trois laboratoires3 et trois ONG4 réfléchissent actuellement aux modalités concrètes d’une collaboration plus étroite : « La première étape de ce partenariat consistera à identifier les besoins exprimés et les différentes façons d’y répondre. » Parmi les pistes à l’étude, certains industriels pourraient notamment permettre à leurs collaborateurs de prêter main forte aux bénévoles de Tulipe… sur leur temps de travail. En attendant, ses dirigeants chercheront à convaincre de nouveaux adhérents. Ils poursuivront leur mission d’évangélisation dans tout le secteur. Globalement peu impliquées, les structures de petite et de moyenne taille seront une cible privilégiée.
Jonathan Icart
(1) Président de Tulipe, Patrice Carayon est également président de Chiesi France.
(2) Le 4 août dernier, une explosion chimique s’est produite dans un entrepôt du port de Beyrouth, où étaient stockées 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium. Le dernier bilan officiel fait état de 207 morts et plus de 6 500 blessés.
(3) Chiesi, Novo Nordisk et UPSA.
(4) Action contre la faim, l’Ordre de Malte et Première Urgence Internationale.