1 milliard de dollars contre l’antibiorésistance
Le Fonds d’action contre l’antibiorésistance, une initiative de la Fédération internationale de l’industrie du médicament (IFPMA), a été annoncé lors de lancements virtuels simultanés à Berlin (Allemagne) et à Washington (Etats-Unis) ce jeudi 9 juillet.
23 sociétés pharmaceutiques mondiales* annoncent le lancement du Fonds d’action contre l’antibiorésistance** de près d’1 milliard de dollars pour soutenir la recherche clinique d’antibiotiques innovants. « En investissant dans de petites sociétés de biotechnologies axées sur le développement de traitements antibactériens innovants, ce Fonds d’action apportera son soutien à des candidats dans les dernières étapes, les plus difficiles, de leur développement, indique Silas Holland, directeur Global Public Policy chez MSD et responsable des relations extérieures de l’initiative contre l’antibiorésistance. Le Fonds apportera aussi un soutien technique important, en donnant accès à l’expertise et aux ressources des grands groupes pharmaceutiques. » Il s’agit d’un partenariat d’une ampleur sans précédent qui vise à mettre à la disposition des patients deux à quatre nouveaux antibiotiques d’ici 2030. « L’enveloppe financière devrait augmenter encore avec la participation d’organisations philanthropiques, de banques de développement et d’organisations multilatérales », complète-il. Le Fonds devrait être opérationnel au cours du quatrième trimestre 2020, après constitution d’un comité scientifique d’experts, à même de sélectionner les projets les plus prometteurs.
Un modèle économique à construire
« La pandémie de coronavirus que nous vivons montre les coûts d’une épidémie non maitrisée, sans vaccin, sans traitement, sans diagnostic. Le monde est aujourd’hui davantage prêt à recevoir ces messages de vulnérabilité et il est plus facile d’attirer l’attention sur la lutte contre l’antibiorésistance », indique Silas Holland. Contrairement à la crise du Covid-19, la crise imputable à la résistance aux antimicrobiens, qui pourrait entraîner le décès de 10 millions de personnes chaque année d’ici 2050, est prévisible et évitable. « Les initiatives de soutien au financement de l’innovation, à l’image de CARB-X– 500M$ sur la période 2016-2021, et de ce nouveau fonds d‘investissement AMR, sont d’excellents outils qui permettent aux biotechs sélectionnées de poursuivre le développement de leurs produits, mais elles restent insuffisantes, constate Florence Séjourné, pdg de la biotech française Da Volterra et présidente de BEAM Alliance, qui regroupe les biotechs européennes du secteur. Malgré les coûts sociétaux énormes, les modèles économiques ne sont pas viables pour de nouveaux antibiotiques. Ce marché de niche a besoin d’un changement de régulations, comme cela a été fait pour les maladies orphelines », alerte-elle. Ainsi, à plus long terme, l’objectif du Fonds nouvellement créé est de faire évoluer les décideurs politiques vers l’adoption d’une réforme des remboursements et la mise en place de nouvelles mesures incitatives pour revitaliser le marché des antibiotiques et stimuler les investissements pérennes.
Juliette Badina
*Almirall, Amgen, Bayer, Boehringer Ingelheim, Chugai, Daiichi Sankyo, Eisai, Eli Lilly and Co, GlaxoSmithKline, Johnson & Johnson, LEO Pharma, Lundbeck, Menarini, Merck, MSD, Novartis, Novo Nordisk, Pfizer, Roche, Shionogi, Takeda, Teva, UCB
**Le Fonds d’action contre l’antibiorésistance a été élaboré par l’IFPMA et la table ronde des PDG de sociétés biopharmaceutiques (BCR), ainsi que par des sociétés et fondations pharmaceutiques, en collaboration avec l’OMS, la Banque européenne d’investissement (BEI) et le Wellcome Trust.
« L’antibiorésistance est un lent tsunami qui menace d’effacer un siècle de progrès médical. Je me félicite de ce nouvel engagement du secteur privé dans le développement de traitements antibactériens urgents. L’OMS souhaite collaborer avec le Fonds d’action pour accélérer la recherche et pouvoir faire face à cette crise de santé publique », Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS.
Werner Hoyer, président de la Banque européenne d’investissement : « La BEI utilise des instruments financiers innovants pour combler activement les défaillances du marché décelées, et la résistance aux antimicrobiens en fait clairement partie. Nous saluons l’occasion qui nous est donnée d’unir nos forces avec des acteurs publics et privés, pour lutter contre cette menace ».