Insuffisance cardiaque, l’opinion publique à témoin
Les cardiologues et l’Assurance maladie se sont associés pour informer le grand public sur la prévention et le dépistage de l’insuffisance cardiaque qui concerne 1,5 million de personnes en France : « Insuffisance cardiaque. Et si votre cœur essayait de vous dire quelque chose ? » Alors que l’incidence augmente, l’heure est au premier bilan.
Jérôme Roncalli, professeur de cardiologie au CHU de Toulouse-Hôpital Rangueil, est venu rappeler lors de la table-ronde dédiée à l’insuffisance cardiaque (IC) du colloque de Pharmaceutiques, que cette maladie est un défaut du débit cardiaque qui ne permet plus de maintenir un organisme fonctionnel. « On dénombre 120 000 nouveaux cas par an d’insuffisants cardiaques en France, chiffre-t-il, repartis pour moitié entre les deux grands types : l’IC à fraction d’éjection réduite (40 % de mortalité à cinq ans ; prévalence stable) ou préservée (prévalence en augmentation du fait du vieillissement de la population) ». Cette pathologie concerne 1,5 million de patients en France. Également vice-président de la Fédération Française de Cardiologie (FFC), il œuvre pour limiter les facteurs de risques cardiovasculaires. Il existe quatre éléments fondamentaux de diagnostic EPOF (essoufflement, prise de poids rapide et non-expliquée, œdèmes des membres inférieurs et fatigabilité à l’effort). « Pathologie fréquente et coûteuse, l’insuffisance cardiaque est une priorité pour l’assurance maladie, ajoute Catherine Grenier, directrice des assurés à la Cnam. C’est la première sur laquelle nous avons mis en place un parcours de soins pour analyser l’état de santé de la population et des pratiques à partir des données disponibles, et actionner des mécanismes de prise en charge. »
« Aller vers » les patients
« Une prise en charge précoce est nécessaire pour une évolution la plus favorable possible, martèle le Pr Roncalli. D’autant qu’une quadrithérapie a fait ses preuves. » C’est ainsi que l’assurance maladie mobilise depuis 18 mois la population générale sur les symptômes détectables avec sa campagne lancée en septembre 2022 : « Insuffisance cardiaque. Et si votre cœur essayait de vous dire quelque chose ? » « Des enquêtes auprès des médecins et des patients nous permettent de constater que la campagne est ancrée dans les esprits, déclare Catherine Grenier. Nous aurons les premières analyses d’impact, notamment sur les taux de re-hospitalisations et la mortalité en 2024. » Les Trophées de l’insuffisance cardiaque Outil’IC, sous le haut patronage de la Cnam, visent à promouvoir et pérenniser à l’échelle nationale les outils et solutions qui ont été développés dans le but d’améliorer la prise en charge de ces patients. Le Dr Johann Masik, médecin généraliste au sein de la CPTS Bray & Bresle, a co-construit le protocole de suivi de l’IC dans l’objectif d’une meilleure coordination. « Nous avons inclus les pharmaciens dans le protocole, comme porte d’entrée d’une filière de dépistage, détaille-t-il. L’entretien pharmaceutique et la connaissance de la patientèle permettent aux officinaux de récupérer les données via le questionnaire EPOF et de mettre en place les études sur l’efficience des protocoles ».
Une approche holistique
« Les brochures d’information « Cool la vie » de l’Alliance du Cœur, validées par la FFC visent à donner des explications claires et des conseils pour permettre aux patients et à leur entourage de bien vivre avec une maladie cardiovasculaire », rappelle Philippe Thébault, président de l’Alliance du Cœur. Le laboratoire Boehringer Ingelheim est venu témoigner de son rôle sociétal en collaboration avec les associations de patients et son rôle d’information des professionnels de santé. « PIC2 est un programme d’optimisation du parcours de soins dans l’IC dont l’objectif est de faciliter le diagnostic précoce et l’adressage qualifié afin d’accélérer la prise en charge par le cardiologue, avec une réduction des délais passant de 65 à 9 jours », témoigne Olivier Simon, directeur médical Maladies chroniques de Boehringer Ingelheim France. L’industriel travaille également avec des start-ups, notamment avec Sêmeia pour le projet DiabetoWise de télésuivi des patients atteints de diabète de type 2.Une approche holistique semble nécessaire, intégrant le dépistage des maladies associées (DT2, BPCO, HTA…) mais également la vaccination contre des pathologies qui peuvent déclencher des hospitalisations, jusqu’à l’accompagnement en sortie d’hospitalisation. « Le programme Prado de l’Assurance maladie a été développé dans l’IC pour intégrer la télésurveillance du patient à domicile », rappelle Catherine Grenier. De l’annonce à l’optimisation thérapeutique, les actions sont en cours.
Juliette Badina
Promotion d’un sommeil de qualité
Le Dr Jean-Philippe Empana, directeur de recherche, co-directeur de l’équipe Inserm Epidémiologie intégrative des maladies cardiovasculaires au centre de recherche cardiovasculaire de Paris, est venu présenter les résultats de travaux de recherche sur le sommeil menés sur 16 000 adultes volontaires*. « Cette étude permet de comprendre l’effet de cinq dimensions du sommeil, que sont les insomnies, l’apnée du sommeil, la durée de sommeil, les somnolences diurnes, et le chronotype précoce, sur les maladies cardiovasculaires, avec l’objectif d’aller vers une réduction du risque. » Les résultats montrent que gagner une dimension optimale de sommeil permet de réduire de 18 % le risque de développer une pathologie cardiovasculaire. « Il existe même un gradient de réduction de risque jusqu’à 60 %, à mesure que l’on augmente le nombre de dimensions optimales, se réjouit le chercheur. Il est grand temps de prendre soin de notre sommeil, qui fait partie des priorités nationales de santé. »
* Enquête prospective de l’équipe Inserm PPS3 et enquête CoLAus du CHUV de Lausanne