Assises de l’Avenir / Investir : les leviers du succès
Lors des Assises de l’Avenir, le 28 juin, Olivier Babeau, président de l’Institut Sapiens, a souligné les limites d’une logique trop comptable de la politique de santé et la nécessité d’évoluer vers plus de prévention et de prospective pour encourager l’investissement et l’innovation.
S’il fait partie des services publics que la crise a rendu prioritaires aux yeux de l’opinion, le budget de l’hôpital public demeure conditionné aux contraintes macro-économiques. Le manque de moyens ne doit pas cependant occulter des problèmes plus profonds d’ordre organisationnel, de logique comptable et, pour finir, un manque d’attractivité. « L’hôpital souffre d’abord des 35 heures, avec une organisation et des conditions de travail qu’il n’a jamais pu intégrer, » note Olivier Babeau, président de l’Institut Sapiens. A cela s’ajoute « un mal très français » qui est la bureaucratisation du système. Le taux de bureaucratie en France se situerait, selon lui, 9 points au-dessus de l’Allemagne. Enfin, il souligne les effets délétères d’une vision comptable de la politique de santé. « La Tarification à l’Activité (T2A) encourage la multiplication des actes et néglige l’expérience métier, » martèle-t-il. Ce qui a occasionné une baisse de l’attractivité de la fonction publique, divisée par deux en quelques années.
Un manque d’investissement et un déficit d’innovation
Cette vision purement comptable de la santé – considérée comme un coût et comme un ensemble de dépenses courantes à réduire – s’est traduite jusqu’ici par un manque d’investissement et un déficit d’innovation en général. Pour l’illustrer, Olivier Babeau cite l’exemple de la lutte contre les douleurs chroniques. « La sécurité sociale préfère payer des médicaments (opioïdes) pour traiter la douleur plutôt que d’investir sur des nouvelles technologies, des investissements plus élevés sur le moment, mais qui permettront de dépenser moins à l’avenir. » Avec 11,2% de son PIB consacré aux dépenses de santé, comparé aux 9,8% pour la moyenne européenne, la France est ainsi l’un des États européens les plus généreux, sans nécessairement faire mieux que ses voisins.
Une vision plus prospective
Il y a donc un impératif à repenser les bases du modèle de santé français, majoritairement tourné vers le tout curatif, en privilégiant une politique de prévention et une vision plus prospective à long-terme. « La médecine de demain sera prédictive, personnalisée, préventive et participative » rappelle-t-il. Autour du sujet central de l’accès aux soins, les enjeux ne manquent pas et les nouveaux défis sont immenses. Pour avancer sur le chemin de la réindustrialisation notamment, la priorité reste la baisse des impôts de production en France, bien plus élevés qu’en Allemagne. Au-delà, créer des ponts entre le public et le privé sera le principal levier de progrès pour améliorer l’investissement, mais aussi la recherche et l’innovation. « Dans le classement du BCG, aucune entreprise française n’est présente parmi les plus innovantes, » déplore-t-il.
Marion Baschet Vernet