Maladies neurodégénératives : les voies du progrès thérapeutique
La plupart des maladies neurodégénératives sont très mal couvertes. Outre un choc de simplification administrative, la collaboration entre les différents acteurs et la prise de risque des investisseurs seront deux prérequis majeurs pour stimuler la recherche et le développement de traitements innovants.
Alzheimer, Parkinson, Lewy, Friedreich, Huntington, Charcot… Rares ou plus courantes, les maladies neurodégénératives ont un dénominateur commun : aucun traitement curatif n’est encore disponible. Une lourde charge pour les patients et les aidants, dont la qualité de vie est profondément altérée. Un sujet critique pour la puissance publique dans un contexte marqué par le vieillissement croissant de la population, qui pourrait sensiblement accroître leur incidence et leur prévalence dans un futur proche. Selon les dernières données publiées par Santé publique France, plus d’un million de personnes sont touchées par la maladie d’Alzheimer ou d’autres formes de démence, 175 000 sont traitées pour la maladie de Parkinson et 2 300 nouveaux cas de maladies du motoneurone sont diagnostiqués chaque année. Certaines approches multidisciplinaires peuvent parfois permettre de soulager la douleur et de prolonger l’autonomie des malades, voire de freiner la progression des symptômes, mais leur efficacité est globalement limitée.
Prise de risque et lourdeurs administratives
A l’instar des dernières immunothérapies dans la maladie d’Alzheimer, des avancées technologiques récentes tracent de nouvelles perspectives pour les patients et leur entourage. Plusieurs freins persistants entravent cependant la découverte, le développement et la diffusion de traitements innovants. Comme souvent, le financement sera un paramètre déterminant dans la conduite du changement. « La prise de risque des investisseurs sera un levier majeur pour franchir le stade de la preuve de concept, tester cliniquement les solutions proposées et accéder plus rapidement au marché », affirme Awatef Ben Tahar, CEO de la startup grenobloise The Element Biotechnology, qui travaille sur un dispositif médical implantable peu invasif délivrant une hydrogénothérapie chronique. Au-delà du temps, des partenariats et des investissements, un choc de simplification administrative sera tout aussi indispensable pour fluidifier le continuum allant de la recherche aux patients, notamment durant les phases précliniques et cliniques. « Il faut bâtir un cadre propice aux innovations, que ce soit en matière de règlementation, de collaboration ou de valorisation », résume Awatef Ben Tahar.
Poursuivre les recherches
Entre autres améliorations, des dispositifs et des outils spécifiques devront être déployés pour rapprocher et fédérer les différents acteurs de l’écosystème. « Il manque une plate-forme nationale, sinon européenne, pour trouver plus facilement les expertises, les équipements ou les financements existants. Le réseau est un facteur clé dans la réussite d’un projet », rappelle Pierre-Antoine Vigneron, enseignant-chercheur à SupBiotech. Faute de remèdes efficaces contre les maladies neurodégénératives, aucune piste de recherche ne devra être exclue. « Nous devrons mieux comprendre les mécanismes génétiques et moléculaires impliqués dans les troubles neurodégénératifs pour les détecter et les traiter plus précocement. Il nous appartient d’explorer toutes les possibilités et d’étudier toutes les hypothèses, sans se restreindre aux approches conservatrices ni céder aux effets de mode. Les oligonucléotides antisens ne seront pas la seule voie de progrès pour innover », confirme Sandrine Humbert, chercheuse spécialiste de la maladie de Huntington au sein de l’Institut du cerveau. De nouveaux modèles expérimentaux, animaux ou cellulaires, pourraient être particulièrement utiles.
Jonathan Icart
NB : ces propos ont été recueillis durant la troisième table ronde du colloque sur les maladies neurodégénératives organisé par Pharmaceutiques le 4 décembre dernier.