Antibiotiques : la résistance s’organise
Alors que l’antibiorésistance a été identifiée par l’OMS comme l’une des 10 plus grandes menaces pour la santé globale, l’organisation lance ce 20 novembre, avec l’OIE et la FAO, un groupe de leaders mondiaux pour travailler sur le sujet.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) ont annoncé ce vendredi 20 novembre la création du Groupe des leaders mondiaux One Health sur la résistance aux antimicrobiens (One Health Global Leaders Group). Une annonce qui intervient dans le cadre de la semaine mondiale pour un bon usage des antibiotiques. L’IFPMA se félicite de l’opportunité pour l’industrie pharmaceutique d’être directement représentée – par Kenneth Frazier, pdg de MSD -, aux côtés d’autres parties prenantes clés, notamment des chefs d’État, des ministres et des dirigeants de la société civile et organisations. « Ce partenariat est un exemple de la collaboration multisectorielle et de l’approche One Health qui sont nécessaires pour accélérer les progrès contre le problème de la résistance aux antimicrobiens », a indiqué Kenneth Frazier dans un communiqué de presse.
Une menace mondiale
L’antibiorésistance a été identifiée par l’OMS comme l’une des 10 plus grandes menaces pour la santé mondiale. « Et nous ne pouvons pas laisser nos enfants le résoudre », a déclaré le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS, lors d’un point presse virtuel. « Aucun secteur ne peut résoudre ce problème à lui seul, a déclaré Qu Dongyu, directeur général de la FAO. Une action collective est nécessaire pour faire face à la menace, à travers différents secteurs économiques et frontières nationales. » Le Groupe des leaders mondiaux a été créé pour plaider en faveur d’une action urgente pour lutter contre la menace de la résistance aux antimicrobiens, qui tue 700 000 personnes chaque année dans le monde. Sans une action forte pour garantir une utilisation appropriée des produits existants, ainsi que des traitements nouveaux et meilleurs, ce chiffre pourrait atteindre dix millions d’ici 2050. « Je suis convaincu que ce nouveau groupe plaidera avec force pour mettre en œuvre la législation et mobiliser les principales parties prenantes pour changer les pratiques d’utilisation des antimicrobiens afin de protéger notre santé et notre bien-être collectif », a déclaré le Dr Monique Eloit, directrice générale de l’OIE. En juillet dernier, un nouveau fonds d’action AMR de 1 milliard de dollars issus de 20 industriels pharmaceutiques, dont MSD, a été lancé pour renforcer le pipeline et commercialiser deux à quatre nouveaux traitements d’ici 2030.
Une consommation qui se stabilise en France
Quelques signaux positifs apparaissent en France. La consommation d’antibiotiques en ville montre depuis trois ans une tendance à la baisse, alors qu’elle restait stable depuis 2008. Cela s’observe aussi pour les produits particulièrement générateurs d’antibiorésistance. Dans les établissements de santé, la consommation globale est stable depuis plusieurs années, avec « une tendance à la diminution depuis 2015 dans ceux participant à la surveillance volontaire coordonnée par la mission nationale Spares (Surveillance et prévention de l’antibiorésistance en établissement de santé) ». Un focus sur les Ehpad rattachés à un établissement de santé révèle une consommation globalement stable en 2018 et 2019, « avec une réduction encourageante de l’utilisation de certains produits à large spectre ». C’est le bilan dressé par Santé publique France dans « Antibiotiques et résistance bactérienne : une infection virale respiratoire évitée, c’est un antibiotique préservé! ». Un sujet d’actualité, car si les antibiotiques ne sont pas actifs sur les infections virales respiratoires – dont le Covid-19 -, ces dernières font pourtant l’objet de nombreuses prescriptions d’antimicrobiens, ce qui participe à l’antibiorésistance, rappellent les auteurs du rapport.
Juliette Badina
Une nécessaire prise de conscience : En dépit de l’urgence de la situation, la prise de conscience par la population française demeure faible. Pfizer lance une campagne de sensibilisation à destination du grand public pour éduquer, informer, et engager chaque individu à une utilisation raisonnée des antibiotiques. Selon un sondage IFOP/Pfizer datant de septembre 2019, seuls 4 Français sur 10 savent ce qu’est l’antibiorésistance. Et, 63 % des personnes interrogées ne se sentent pas concernées par la nécessité de raisonner leur consommation. La nouvelle campagne de sensibilisation « Aidons les antibiotiques à continuer à sauver des millions de vies » est diffusée sur YouTube depuis le 1er octobre 2020 et en novembre sur les écrans de plusieurs centaines d’officines et cabinets médicaux de France.