Médication officinale : une campagne à double détente
Les industriels et les pharmaciens lancent une campagne de communication visant à consacrer le rôle des officines dans la prévention et le traitement des pathologies bénignes. Derrière cet affichage, ils plaident pour la création d’un parcours de soins exclusivement dédié aux maux du quotidien.
Laboratoires et pharmaciens ont décidé de faire front commun pour promouvoir un usage encadré et sécurisé des produits de santé et de prévention de premier recours… par le biais d’une campagne de communication intitulée « Ma pharmacie, mon conseil santé ». Inspirée de l’exemple britannique, elle positionne l’officine comme le lieu de référence pour la prise en charge des pathologies bénignes. « Les infections courantes ne nécessitent pas toujours un diagnostic médical. Disponible et compétent, le pharmacien peut répondre à la demande des patients », estime Antoine Bon, vice-président de NèreS, co-promoteur de cette opération de sensibilisation menée en partenariat avec la FSPF, l’USPO et l’ANEPF. Annoncée de longue date, elle doit permettre d’ancrer le réflexe officinal dans l’inconscient collectif. Ses grands messages seront principalement relayés sur les réseaux sociaux. Des affiches seront également placardées dans les pharmacies du pays. Destinée au grand public, elle ciblera plus particulièrement les jeunes mamans et les habitants des zones rurales âgés de plus de 55 ans. Elle sera dotée d’un budget de 100 000 d’euros.
Une démarche au long cours
La démarche revêt une dimension symbolique à plusieurs égards. Présenté quelques jours plus tôt, le dispositif a été officiellement lancé le 25 septembre dernier, à l’occasion de la journée mondiale des pharmaciens. Elle intervient surtout dans un contexte pandémique durant lequel la profession a su démontrer son utilité. Elle bénéficie par ailleurs du soutien implicite de l’Ordre qui a autorisé l’utilisation de la croix verte. A l’instar du marché, la stratégie de communication déployée aura une dynamique saisonnière. Centrée sur les maux hivernaux, la première phase s’achèvera en février prochain. « L’initiative sera reconduite au printemps ou à l’été. Des ajustements seront effectués en fonction des retombées », signale Luc Besançon, délégué général de NèreS. Un site internet dédié fera le lien entre les différentes coupures. Vouée à perdurer, la collaboration entre les parties prenantes se poursuivra dans un esprit de co-construction. « Les syndicats professionnels et étudiants participeront activement au choix des formats et des contenus proposés », insiste-t-il. Particularité notable : aucun médicament ne sera mis en avant dans les communications à venir.
Un objectif sous-jacent
Derrière l’affichage, cette campagne marque la première étape d’un projet bien plus ambitieux. Appuyés par les industriels du secteur, les responsables syndicaux plaident pour la création d’un parcours de soins réservé aux affections du quotidien, dont la coordination devra être assurée par le pharmacien. La dispensation ne serait pas une fin en soi. « Nous pourrons conseiller les patients ou les orienter vers les bons interlocuteurs », affirme Philippe Besset, président de la FSPF. Outre la volonté politique, cette transition sera soumise à deux conditions majeures. « Les spécialités délivrées et les conseils associés devront être systématiquement inscrits dans le dossier pharmaceutique pour sécuriser la pratique », rappelle Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO. Autre exigence imposée : les pharmaciens auront besoin d’un arsenal thérapeutique renforcé. « L’innovation ne doit pas être l’apanage de la prescription médicale. Nous attendons des molécules et des conditionnements adaptés aux traitements de courte durée », prévient Gilles Bonnefond, porte-parole de l’USPO. Une demande explicitement adressée aux laboratoires et aux autorités de santé.
Jonathan Icart