TROD Covid-19 : un double enjeu pour l’officine
A titre exceptionnel et pour une durée limitée, les officines françaises sont autorisées à réaliser des TROD sérologiques. Elles peuvent également participer à une enquête épidémiologique, destinée à évaluer le niveau d’immunité collective. Double objectif de la démarche : éclairer la décision publique et valoriser le rôle du pharmacien dans les politiques de prévention et de dépistage.
Les pharmacies d’officine font désormais partie intégrante de la stratégie de dépistage déployée par le gouvernement. Depuis deux mois, elles sont autorisées à pratiquer des tests rapides d’orientation diagnostique, capables de détecter la présence d’anticorps contre le nouveau coronavirus. 51 dispositifs de ce type ont été labellisés par le ministère de la Santé. Ils disposent tous d’un marquage CE. Non remboursables, leur prix est estimé à une vingtaine d’euros, en moyenne. Techniquement, le pharmacien procède à un prélèvement de sang capillaire, qu’il met en contact avec un réactif. Une dizaine de minutes suffisent pour obtenir un résultat qui devra toutefois être confirmé par un laboratoire de biologie médicale. Prescrite par le médecin, systématiquement informé de la situation, une prise de sang complémentaire devra alors permettre de mesurer la réponse immunitaire. Une analyse virologique pourra également être recommandée. A noter : cette autorisation exceptionnelle devait s’achever à la fin du mois d’octobre, mais elle pourrait être prolongée dans le temps.
Un atout pour la recherche épidémiologique ?
L’implication des pharmaciens ne se limite pas à cette seule tâche. Entre la réalisation et le résultat du test, ils peuvent proposer aux patients volontaires de participer à une enquête épidémiologique, à l’aide d’un questionnaire rapide développé par CovidIA*. « Nous voulons sensibiliser les pouvoirs publics sur le rôle important des pharmacies dans les politiques de prévention et de dépistage », commente Gilles Bonnefond, président de l’USPO. Née d’un partenariat avec la SFSPO**, cette production statistique anonymisée doit notamment contribuer à améliorer la connaissance sur le niveau d’immunité collective, grâce à des techniques d’intelligence artificielle. Selon les premières indiscrétions, un millier de réponses ont déjà été compilées. Des données plus complètes seront présentées dans les prochains jours. A l’heure actuelle, il n’existe aucun chiffre officiel sur le nombre exact de TROD Covid-19 effectués en France.
Des échéances décisives
La démarche n’est pas tout à fait anodine pour l’officine. En cours d’homologation par la HAS, l’arrivée imminente des tests salivaires attise déjà les convoitises. « Nous pourrions dépister plus largement la population, ce qui aurait au moins le mérite de désengorger les laboratoires de biologie médicale, aujourd’hui totalement saturés », souligne Gilles Bonnefond. Un avis loin d’être partagé par les principaux intéressés. Une nouvelle fois, le réseau officinal misera sur ses traditionnels atouts pour convaincre les décideurs, autrement dit son maillage territorial et sa relation de proximité avec le grand public, dont il a globalement la confiance. A plus long terme, une autre échéance décisive se profile déjà, celle de la vaccination contre la Covid-19. « Notre réputation n’est plus à faire. Nous avons démontré toute notre valeur ajoutée dans le champ de la grippe saisonnière, avec un réel impact sur la couverture vaccinale. Nous sommes prêts à relever ce défi ! » Les autorités sanitaires seront-elles sensibles à ces arguments ?
Jonathan Icart
(*) CovidIA est un projet porté par PandemIA, une association philanthropique et humaniste composée de médecins, de scientifiques et de chercheurs. Elle a été agréée par la CNIL pour collecter et traiter des données dans le respect de la réglementation dite « RGPD ».
(**) Société française des sciences pharmaceutiques officinales – SFSPO.