Un livre blanc pour une politique française du One Health
A l’occasion de la Journée mondiale One Health et de la présentation du Livre blanc sur sa mise en pratique dans la politique française, des experts des « trois santés » ont débattu des moyens de favoriser l’appropriation de ce concept par tous les acteurs.
Vache folle, grippe aviaire, Covid-19… « Ces dernières années ont été marquées par des crises sanitaires à répétition, mettant en évidence l’interaction des trois écosystèmes que sont la santé humaine, la santé animale et la santé environnementale », a rappelé le député creusois LREM Jean-Baptiste Moreau, agriculteur de profession, en ouverture d’une conférence organisée à Paris le 3 novembre (journée mondiale One Health), pour la présentation du Livre blanc « 36 actions à mettre en place pour une politique française ambitieuse Une seule santé ».
Piloté par Jean-Luc Angot (photo ci-contre), inspecteur général de santé publique vétérinaire, membre de l’académie de médecine et ancien président de l’académie vétérinaire de France, ce document a été réalisé avec le soutien institutionnel de MSD santé animale, à partir des contributions de 19 experts des « trois santés ». « Il y a beaucoup d’initiatives sur le thème One Health, reconnaît Jean-Luc Angot. Celle-ci est une contribution supplémentaire, formulant des recommandations destinées aux décideurs publics à l’aube de la présidence française de l’Union européenne. Tant mieux si plusieurs propositions convergent ! Si le concept One Health ne prospère pas après la crise de Covid-19, je ne sais pas quand il le fera. »
Le premier défi, reconnu par tous, sera culturel, car comme le souligne Jean-Baptiste Moreau, « le vivant nécessite une approche globale » : les acteurs de différents domaines devront apprendre à travailler ensemble. D’où la nécessité, selon les auteurs du Livre blanc, de « mettre en place une gouvernance au plus haut niveau, sous l’égide du Premier ministre » (proposition n°9).
L’alimentation et l’antibiorésistance comme portes d’entrée
Pour que cette approche puisse se développer dans toutes les politiques publiques, les dirigeants mais aussi la société civile doivent pouvoir se l’approprier. Le Livre blanc plébiscite l’alimentation comme « porte d’entrée », un choix jugé pertinent par l’ensemble des participants au débat qui a suivi la présentation du document. « L’alimentation est un facteur de bonne santé humaine, mais pose aussi la question de la sécurité alimentaire, des modes de production ou encore des risques de contamination par des agents extérieurs », note Emmanuelle Soubeyran, récemment nommée directrice générale adjointe de l’alimentation au sein du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.
Autre « porte d’entrée » possible, celle de l’antibiorésistance (1), qui a été « l’occasion d’une première prise de conscience » des interactions entre les écosystèmes, selon Christiane Lambert, présidente de la FNSEA (2). « Sans qu’il soit drastiquement contraignant, le plan Ecoantibio a conduit à une réduction de 39 % de l’usage des antibiotiques dans l’élevage ! » rappelle-t-elle. Mais pour Jean-Pierre Orand, directeur de l’Agence nationale du médicament vétérinaire, « on ne pourra pas développer les élevages en supprimant totalement le recours aux antibiotiques : il faut combler le manque de connaissances scientifiques dans ce domaine pour mettre en place des politiques plus adaptées ». Une position rejointe par l’infectiologue Alexandre Bleibtreu, l’un des contributeurs du Livre blanc, qui recommande de développer les recherches sur l’impact individuel des antibiotiques sur l’environnement et sur le microbiote humain.
Julie Wierzbicki
(1) Voir le dossier consacré par Pharmaceutiques aux enjeux de la résistance bactérienne aux antibiotiques – n°253, janvier 2018. Un nouveau dossier sera consacré à l’approche One Health dans les prochains mois.
(2) Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles