Radiothérapie : l’Institut Curie investit
En amont de la Journée Mondiale contre le Cancer le 4 février 2023, l’Institut Curie annonce un plan d’investissement d’envergure pour proposer une radiothérapie adaptive et personnalisée, garantissant une meilleure qualité de vie pour les patients.
Plus de 70 % des traitements contre le cancer incluent des séances de radiothérapie, utilisée seule ou en association avec la chirurgie ou la chimiothérapie. Avec le plateau technique le plus complet d’Europe, l’Institut Curie est le premier centre de radiothérapie et de protonthérapie en France. A l’approche de la prochaine journée mondiale contre le cancer, l’institut annonce le lancement d’un vaste programme d’investissement de 56 millions d’euros sur six ans « pour moderniser notre plateau technique actuel, nous doter d’une 12e machine et faire bénéficier les patients des techniques les plus innovantes sur nos trois sites (Paris, Saint-Cloud et Orsay) », indique le Pr Steven Le Gouill, directeur de l’ensemble hospitalier de l’Institut Curie. Les enjeux de la prise en charge en radiothérapie ont profondément évolué ces dernières années grâce aux progrès médicaux et technologiques et cette transformation va se poursuivre dans les années à venir vers une meilleure prise en charge des patients. Le Pr Thierry Philip, président du directoire de l’Institut, cite la radiothérapie stéréotaxique (irradiation de haute précision à forte dose), déjà utilisée chez certains patients atteints de cancers localisés de la prostate, et adaptative (en fonction des variations observées en cours d’irradiation) avec pour objectif une réduction du nombre de séances. Cette dernière approche est déjà proposée depuis 2021, notamment chez des patientes âgées porteuses de cancer du sein sans risque élevé de récidive. Ces techniques seront notamment rendues possibles grâce à l’intégration de logiciels d’intelligence artificielle ou des systèmes d’imagerie embarquée. « Aujourd’hui, grâce à des équipements de dernière génération, nous nous donnons les moyens d’interpréter l’ensemble des données, de prédire l’évolution de la maladie et d’anticiper au mieux des traitements de plus en plus complexes au bénéfice de nos patients », se félicite le Pr Gilles Créhange, chef du département d’oncologie-radiothérapie de l’institut.
Un changement de paradigme
La conférence de presse de lancement de ces investissements
a été l’occasion pour le Pr Alain Puisieux, directeur du centre de recherche de
l’Institut Curie, de présenter quelques-unes des innovations qui y sont nées. Une
nouvelle technique de délivrance de dose a été découverte par l’équipe «
Nouvelles approches en radiothérapie » menée par le Dr Yolanda Prezado : les
mini-faisceaux de protons (ou mini-beam). « Cette technique utilise des
faisceaux de protons submillimétriques et s’avère très prometteuse pour le
traitement des tumeurs radiorésistantes et de mauvais pronostic, en particulier
les gliomes et certains cancers pédiatriques », détaille la physicienne et
directrice de recherche CNRS. L’entrée en phase clinique est prévue dans
l’année ; les discussions règlementaires sont en cours.
Découverte en 2014 par l’équipe du Dr Vincent Favaudon, chercheur à l’Inserm,
le « Flash » est une technique dans laquelle une irradiation (par protons
ou électrons de très haute énergie) à ultra-haut débit de dose est délivrée en
une fraction de seconde, épargnant les tissus sains. Des études cliniques
doivent confirmer le potentiel révolutionnaire dans les prochaines années. L’équipe
« Réparation, Radiation et Thérapies innovantes anticancer », grâce aux
travaux du Dr Marie Dutreix, directrice de recherche émérite au CNRS, a, elle,
développé une nouvelle classe de médicaments, les Dbait, qui augmentent
l’efficacité de la radiothérapie. Un essai clinique de phase Ib/II, AsiDNA™
Children, est en cours avec la biotech Onxeo pour traiter des enfants avec un gliome
de très haut grade. De nombreux autres projets sont en cours pour associer la
radiothérapie aux immunothérapies, nanoparticules, DBaits… et disposer d’un
arsenal toujours plus important contre le cancer.
Juliette Badina