Maladies oculaires : mieux dépister pour mieux traiter !
Au regard de leur prévalence croissante, la prévention, le traitement et le suivi des maladies oculaires doivent être améliorés. Selon les experts réunis par Pharmaceutiques, le dépistage précoce sera la pierre angulaire de cette stratégie, appuyée par les nouvelles technologies.
Rétinopathie diabétique, dégénérescence maculaire liée à l’âge, glaucome, cataracte… Les principales maladies oculaires sont particulièrement invalidantes et potentiellement cécitantes, notamment chez les adultes. Au regard de leur prévalence croissante, en partie due au vieillissement de la population, les modes de prise en charge et les stratégies de prévention doivent évoluer. Les principaux facteurs de risque sont globalement identifiés, en particulier sur le plan métabolique et cardiovasculaire. « Les modes de vie ont des incidences notables sur la santé visuelle. Le tabagisme est directement impliqué dans la survenue de nombreuses pathologies oculaires, comme la DMLA. Le diabète, l’hypertension et l’hypercholestérolémie le sont aussi dans la rétinopathie », rappelle le Dr Cécile Delcourt, épidémiologiste et directrice de recherche Inserm, non sans évoquer les « effets protecteurs » du régime alimentaire méditerranéen. Longtemps négligés voire sous-estimés, les impacts environnementaux sont progressivement démontrés, notamment dans le glaucome. « Le niveau de risque est plus important chez les personnes vivant dans des zones polluées avec une accélération observée de la perte des fibres nerveuses rétiniennes », affirme-t-elle. Un propos inspiré des grandes conclusions de l’étude Alienor.
Une action globale
Les experts réunis par Pharmaceutiques sont unanimes : la détection précoce des symptômes oculaires reste le meilleur moyen de ralentir leur évolution et de retarder les complications. Un objectif prioritaire pour l’Union nationale des aveugles et déficients visuels, dont le bus itinérant dépiste gratuitement près de 3 000 personnes par an. « Nous menons également des actions de dépistage dans le milieu professionnel qui nous ont permis de toucher 500 salariés en 2023 », souligne Manuelle Mellado, sa présidente. Dynamique et engagée, y compris sur les volets de la sensibilisation et de l’accompagnement à travers ses huit centres régionaux et son Ehpad, cette association a dépisté plus de 41 000 patients depuis 2012. Solidement implantée dans les territoires, l’UNADEV est aussi très active dans le champ de la recherche médicale. « Nous avons financé quarante-huit projets de recherche sur les maladies de la vue, tant sur leurs origines que leurs traitements, au cours des dix dernières années. Nous avons également signé un partenariat ambitieux avec la Fondation de la recherche médicale en 2023 », signale Manuelle Mellado. Dernière initiative en date, l’association a récemment publié le deuxième volet de son enquête sur les préjugés à l’égard du handicap visuel.
Un virage technologique
Dans un contexte marqué par les difficultés d’accès aux ophtalmologistes, le progrès technologique pourrait sensiblement améliorer le diagnostic et le suivi des pathologies oculaires chroniques. « Certains systèmes d’imagerie sophistiqués, comme la tomographie en cohérence optique, permettent visualiser l’épaisseur des fibres optiques et l’état de la rétine. Ces clichés pourraient être assez facilement pris et transmis par des orthoptistes afin de détecter et de prioriser les cas les plus urgents », estime le Dr Ali Erginay, praticien hospitalier service d’ophtalmologie de l’Hôpital Lariboisière. Expérimentée pendant deux ans dans le cadre du dispositif « article 51 », la plateforme de télésurveillance OdySight participe de cette même logique. « Notre application permet aux utilisateurs de tester leur acuité visuelle de manière ludique, via des jeux interactifs accessibles sur smartphone ou tablette. Les signaux faibles sont automatiquement relayés aux ophtalmologistes partenaires pour une intervention rapide », résume le Dr Bénigne Mathieu, chief business officer de Tilak Healthcare. Utilisée par 1 000 praticiens et 25 000 patients depuis son lancement en 2018, cette solution numérique – prescrite – est temporairement prise en charge par l’Assurance Maladie, en attendant un éventuel remboursement de droit commun.
Jonathan Icart
NB : ces propos ont été recueillis durant la deuxième table ronde du colloque sur la santé visuelle organisé par Pharmaceutiques le 3 décembre dernier.