Les maladies rares, priorité de la prochaine présidence française de l’UE
En amont de la Journée mondiale des maladies rares (28 février), le ministre de la Santé Olivier Véran s’est engagé devant la communauté des maladies rares à inscrire ce sujet parmi les priorités de la prochaine présidence française du Conseil de l’Europe, au premier semestre 2022. Il reviendra à la France de lancer la mise en œuvre des recommandations de RARE 2030 pour impulser une nouvelle politique européenne.
L’annonce était attendue : en ouverture de la conférence RARE 2030, organisée le 23 févier, le ministre de la Santé et des Solidarités Olivier Véran a assuré qu’à partir de janvier 2022, la présidence française du Conseil de l’UE « fera de la lutte contre les maladies rares une priorité, avec un renforcement des réseaux européens de référence (ERNs) et la révision du règlement européen sur les médicaments orphelins ».
Cette priorisation était une revendication portée par les associations de malades. « C’est sous la présidence française de l’UE en 1995 qu’a été introduit le projet de règlement européen sur les médicaments orphelins, et la France a été à la manœuvre pour l’élaboration de la recommandation européenne sur les plans nationaux maladies rares dans les Etats membres », rappelait Yann Le Cam, président de la fédération Eurordis, lors d’une conférence de presse organisée le 16 février par les acteurs de la plateforme maladies rares française.
Une feuille de route pour une nouvelle politique
Les parties prenantes comptent notamment sur la France pour préparer la mise en œuvre des propositions issues de la large étude prospective RARE 2030 financée par la Commission européenne, présentées le 24 février. L’eurodéputé Cristian-Silviu Buşoi a salué « une feuille de route avec des recommandations claires pour une politique européenne ». Celle-ci se décline en huit grandes recommandations * promouvant une coopération renforcée entre Etats et une approche holistique des besoins du patient. Certaines sont d’ores et déjà inscrites dans l’agenda législatif européen pour ces prochaines années, via notamment le règlement santé EU4Health et la révision du règlement sur les médicaments orphelins. Concernant ce dernier, une étude d’impact sur les différentes incitations actuelles ou envisageables pour les industriels vient d’être lancée ; une consultation publique doit également être conduite cette année, en vue d’une proposition législative au premier trimestre 2022.
Une R&D bénéfique au plus grand nombre
Plusieurs participants à la conférence Rare 2030 ont par ailleurs insisté sur la nécessité de continuer à investir massivement dans la recherche, publique ou privée, tant il est vrai que les avancées scientifiques et médicales réalisées dans le champ des maladies rares peuvent également bénéficier aux pathologies plus fréquentes. Une réalité désormais bien intégrée dans la stratégie des laboratoires pharmaceutiques. La crise sanitaire actuelle l’illustre particulièrement. Les premiers vaccins anti-Covid, fondés sur l’ARN messager, ont été mis au point dans des délais record. Or les premières applications médicales de l’ARN ont été développées pour des pathologies rares, comme l’amyloïdose héréditaire à transthyrétine. « Il a fallu concevoir des formulations galéniques adaptées à l’utilisation de ce type de molécule… et ce sont elles qui sont mises en œuvre aujourd’hui dans les vaccins anti-Covid », a souligné le Pr Daniel Scherman, directeur de la Fondation maladies rares, le 16 février.
Vers un marché européen des médicaments orphelins ?
Inversement, la gestion des commandes de vaccins anti-Covid au niveau communautaire suscite beaucoup d’espoirs pour répondre aux enjeux de la 8e recommandation de RARE 2030 sur l’accès aux médicaments. « L’achat groupé de ces vaccins a montré que cela était possible : c’est un cheval de Troie, un modèle à suivre pour nos pathologies », a assuré Hélène Berrué-Gaillard, vice-présidente de l’Alliance Maladies Rares, le 16 février. Lors d’un atelier spécifique durant la conférence RARE 2030, Simone Boselli, directeur des affaires publiques d’Eurordis, a lui aussi appelé à une négociation des prix des médicaments orphelins au niveau européen. Mais pour Diego Ardigo, en charge de la R&D maladies rares du laboratoire Chiesi, il ne faut pas songer à un tel niveau de centralisation tant que les Etats ne se seront pas mis d’accord sur une définition commune de la valeur et sans un cadre effectif pour une évaluation européenne des technologies de santé.
Julie Wierzbicki
* Les huit recommandations de RARE 2030 :
1- Un nouveau cadre politique européen, guidant la mise en œuvre de plans et stratégies nationaux intégrés et de long terme
2 – Un diagnostic plus tôt, plus vite et plus précis
3- Un écosystème apportant un soutien politique, financier, opérationnel et technique pour garantir l’accès à des soins de haute qualité
4- Une prise en charge intégrée et centrée sur la personne
5- La promotion de la participation, de l’engagement, de l’implication et du leadership des personnes malades
6- Une R&D innovante et guidée par les besoins des malades
7- L’optimisation des données et de leur utilisation au bénéfice des patients et de la société
8- Des traitements disponibles, accessibles et abordables